« Le massacre des Innocents » – une traversée de nos déserts

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Le Massacre des Innocents. Nicolas Poussin. Musée de Condé ©Wikimédia Commons

Hérode craignait l’avènement d’un roi des Juifs au moment de la naissance de Jésus. Il ordonna donc l’assassinat systématique de tous les garçonnets de moins de deux ans nés vers Bethléem. Premier massacre des innocents, suivi de tant d’autres, jadis et maintenant, ici et là. Cette traversée à travers nos déserts, la poète Huguette Junod la partage dans son livre « Le Massacre des Innocents ».

Il vient d’être publié par les Editions des Sables à Genève. Le voyage que la poète propose est peuplé de précipices aux falaises de sang mais il vaut mille fois la peine d’être parcouru. C’est chacune, chacun de nous qui est pris à partie, victime, témoin ou bourreau, parfois les trois à la fois. Car l’innocence n’est le lot que des enfants. Les adultes ont vite du sang dans la mémoire.

(…) Les enfants sacrifiés
Violés utilisés
Écrasés morcelésÀ supprimer(…)

(…) Que vaut la vie d’un enfant
devant le Veau d’or
le dieu Mammon
le fric ! (1)

L’innocence provocatrice

A croire que l’innocence relève de la provocation la plus insoutenable pour tous les porteurs de glaive qui ensanglantent l’Histoire, notre histoire, avec une grande ou une petite hache, comme le dit Perec.

Rien n’est plus accusateur que le regard étonné d’un enfant devant l’adulte perdu dans sa colère. Se débarrasser, vite, de cet innocent. Ni pleurnicherie ni hésitation.

Ou alors les violer en soutane ou sans soutane, les avilir dans les images pornos qui tournent en boucle sur les réseaux asociaux.

Ou alors les exploiter dans les pays de misère pour fabriquer les ballons avec lesquels d’autres gosses, plus chanceux, joueront au foot.

Huguette Junod évoque aussi la beauté des origines, l’émotion toujours renouvelée devant le chef d’œuvre d’un brin d’herbe. Tout ce que l’homme s’efforce aujourd’hui de détruire pour satisfaire cette démesure devenue sa seule mesure. Cet homme qui résiste à tout, aux larmes qu’il fait couler et au spectacle de ses injustice. A tout, sauf à son hybris, son vice sans fin, ni frein.

Mais tout s’achève un jour, même cette époque cynique et maussade.

Tant que chantera l’Oiseau de Paradis
Que le Dauphin dansera
Il y aura de l’espoir…

Merci Huguette Junod.

Jean-Noël Cuénod

1 Les extraits cités dans ce papier sont tous issus du livre d’Huguette Junod « Le Massacre des Innocents ».

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