Tudieu, quel pastis! Le député marseillais Sébastien Delogu (LFI) – en brandissant mardi un drapeau palestinien à l’Assemblée nationale – a provoqué un scandale stratosphérique, voire intergalactique. Suffocations indignées, postures matamoresques, monte de nabots sur leurs grands chevaux, hybridation de grands et gros mots, tout ça pour un bout de tissu agité au mauvais endroit!
« C’est très grave, on est sorti de la vie démocratique », s’étrangle la journaliste Ruth Elkrief au micro de Radio-Classique. Rien que ça! Pourtant, depuis la Révolution en passant par toutes les Républiques, les débats parlementaires en ont vu d’autres et de bien plus salées.
Punition maximale pour débordement textile
La punition la plus sévère a donc été réservée au député coupable de ce débordement textile: exclusion du parlement pendant quinze jours. Au ridicule de la situation s’ajoute le grotesque de la sanction, totalement disproportionnée.
Sébastien Delogu s’en remettra d’autant plus que le voilà sorti de l’anonymat dissimulant le député de base sous un voile d’indifférence. Et puis, en pleine campagne des élections européennes, se rappeler au bon souvenir des électeurs musulmans, c’est toujours utile pour un parti qui s’adresse à cet électorat.
Un drapeau qui voile le vrai débat
Sans doute, le député insoumis a-t-il sincèrement voulu, par son geste, défendre la reconnaissance de l’Etat palestinien par la France, à l’instar de la Norvège, de l’Espagne et de l’Irlande.
Eh bien c’est raté! De quoi a-t-on parlé dans les médias français? De la Palestine? De la solution à deux Etats? De la position de la France?
Que non pas! C’est l’acte lui-même – pourtant bien anodin en regard de la situation catastrophique à Gaza – qui a été surtout disséqué.
Le député Delogu a-t-il porté un coup meurtrier à la dignité des débats? Cette dignité est-elle ou non souvent mise à mal? En quoi consiste le règlement de l’Assemblée nationale? Sa présidente Braun-Pivet l’a-t-elle bien appliqué? Ou mal? Pourquoi une sanction? Est-elle trop lourde? Ou trop légère?
La position émise par le président Macron – prêt à reconnaître l’Etat palestinien « mais pas maintenant, sous le coup de l’émotion » – aurait pourtant mérité que nos médiacrates la scrutassent. Peine perdue, le drapeau a tout voilé.
L’image remplace le discours
Le député Delogu a utilisé le langage d’aujourd’hui qui a l’image comme vecteur principal de tout discours. On ne saurait lui reprocher d’agir en fonction de l’air du temps.
Un air du temps qui remplace l’utile par le futile et la réflexion par la réaction.
Et nous voilà comme autant de taureaux courant sus à la muleta, en laissant de côté celui qui l’agite.
Jean-Noël Cuénod