Pâques 2024? Mais à quel saint se vouer?

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Une des peintures murales du XVe siècle remarquablement restaurées à l’Eglise Notre-Dame-de-l’Incarnation d’Antigny (département de la Vienne) ©JNC_Beaurecueil-Forge de la Poésie.

Au moment où le monde sombre dans le chaos, où les solutions aux plus ardents problèmes sont connues sans que quiconque ne veuille les mettre en œuvre, où le flot des misères de toutes natures ne cesse de monter, célébrer Pâques semble incongru à nos âmes mornes. Pourtant quand l’espoir s’évapore, il reste le sel de l’espérance pour redonner à la vie son goût âpre et doux.

Mais à quel saint se vouer, grand Dieu? A aucun, Dieu merci! La sanctification n’est qu’une mise en grade d’être humains ordonnée par des institutions confessionnelles à but de promotion marketing.

Du saint, il n’y a rien à attendre, rien à espérer. Comme il n’y a rien à attendre, rien à espérer des Grands Hommes ou des Femmes Célèbres. Les érige-t-on en gloire qu’un jour ou l’autre leur côté noir prendra la dessus.

L’humain tissé d’ombres et de lumières

L’humain est ainsi fait qu’il demeure tissé d’ombres et de lumières, en proportions variables selon les individus. Il est vrai cependant que chez certains personnages les fils d’or sont bien malaisés à découvrir dans leur magma fangeux.

Alors, c’est vrai, il y a de quoi désespérer. Où que notre regard nous porte, c’est la trahison, la violence, la veulerie, la misère qui dictent leurs conditions à une humanité confite en stupidité.

L’humain a conçu les plus nobles idées de paix, de justice, de liberté pour les porter au-dessus de lui, comme autant de reliques sacrées. Mais c’est sur sa tête qu’elles se sont effondrées, c’est sur leurs cadavres en décomposition qu’il est en train de patauger. « Et quand il croit serrer son bonheur il le broie / Sa vie est un étrange et douloureux divorce » écrivait le poète Aragon.

L’espérance, empreinte de l’espoir envolé

Quand l’espoir meurt étouffé par le dense réseau des pensées tristes, il nous laisse son empreinte génétique, l’espérance.

Ce n’est rien, l’espérance. Rien qu’une trace de confiance en la vie qui persiste en dépit des évidences du malheur. Une braise qui rougeoie et bouronne sans se consumer, sans diminuer, sans jamais perdre de sa substance aussi infinitésimale qu’elle soit.

Le Christ en nous

Ce rien, vous l’appellerez comme vous le voulez. Pour ma part, c’est le Christ Jésus qui ne m’a jamais quitté malgré toutes mes erreurs, mes fautes, mes crimes peut-être; la présence amie qui me parlait avant que je sache décrypter la langue des adultes et qui m’enveloppera dans son souffle lorsque le temps d’aller me faire voir ailleurs sera venu.

Oh, il n’a pas grand chose à voir avec le Christ en gloire des cathédrales ou le blondinet barbu des peintures! Ni avec les dogmes des confessions qui tentent de le réduire à l’état de code pénal.

Ce Christ en nous, en moi, illustré par les Evangiles, offre ce récit dont même les institutions ecclésiastiques ne sont pas parvenues à tamiser la force, malgré tous leurs efforts humains, trop humains.

Un récit qui, à travers les siècles, demeure bouleversant. Celui de la puissance divine qui revêt tous les aspects de la souffrance humaine, la trahison, la calomnie, l’injure, le mépris, la haine, la torture, l’injustice, même l’abandon de Dieu – Dieu abandonné par lui-même, c’est plus fort et fou que tout ce qu’un humain peut imaginer! – et l’effondrement dans la mort.

Puis, la résurrection du Christ faisant des Pâques ce passage de la mort à la vie, comme Pessa’h, la Pâque juive que Jésus célébrait, signifie le saut par-dessus l’esclavage.

Personne ne sautera à notre place par-dessus l’esclavage des peurs. Même si nous sommes tous couronnés d’épines,

puisse l’espérance nous donner l’élan. La vie est là!

Jean-Noël Cuénod

5 réflexions sur « Pâques 2024? Mais à quel saint se vouer? »

  1. Si je comprends bien, vous ne portez pas les « institutions confessionnelles » dans votre cœur et çà se comprend parfaitement. Par contre, je trouve que de les accuser de « promotion marketing » à propos des saints me paraît ressortir d’un anticléricalisme viscéral. Je ne pensais pas qu’un journaliste de votre qualité et que par ailleurs j’apprécie beaucoup pouvait à ce point perdre tout jugement équilibré dès que l’on parle des institutions religieuses.

    Porter en exemple une Sainte comme Mère Térésa, est-ce selon vous de la « promotion marketing »?

  2. Juste un peyit point d’info: Mère Térésa, alias Agnes Gonxha Bajaxhiu, albanaise du Kosovo, par ses refus des protections en matière de sexualité, est responsable de la mort de milluiers de mamades du Sida. On a connu des Saintes moins maculées de sang.
    Et pour faire bonne mesure, en écho fraternel au texte de Jean-Noël qui n’est guère plus anticlérical que tout bon intellectuel jésuite à la pensée subtile, ce poème fort ancien:

    Tu cherches Dieu
    dans la pierre des cathédrales
    la musique de Pergolèse
    le Chant des chants

    Tu te moques bien de le trouver

    Tu sais :
    Pareillement borné fainéant et stupide
    qui l’a trouvé
    qui ne le cherche pas

    • Votre commentaire très nuancé m’a fait découvrir une réalité que je ne connaissais pas. J’ai côtoyé Mère Térésa en ignorant totalement qu’elle était responsable de tant de sang versé. Maintenant, grâce à vous, je le sais et dorénavant je serai plus prudent dans mes fréquentations. Dire que l’on peut fréquenter des criminels sans le savoir.

  3. une relecture est toujours nécessaire contre les facéties du clavier mal tempéré:
    Juste un petit point d’info: Mère Térésa, alias Agnes Gonxha Bajaxhiu, albanaise du Kosovo, par ses refus des protections en matière de sexualité, est responsable de la mort de milliers de malades du Sida. On a connu des Saintes moins maculées de sang.

  4. Quelle finesse et quelle justesse pour parler de ta foi en l’humain au-delà de tout ce que l’on connaît !
    L’humanité a progressé en 40.000 ans alors oui, gardons l’espoir ! La vie est là.

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