François Bayrou, le muet du climat!

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Un discours bien fumeux mais pas fumant… ©JNC_Beaurecueil-Forge de la Poésie.

Rien que pour ça, le premier ministre Bayrou mérite de passer à la trappe de la censure! Durant son discours de politique générale mardi – 90 minutes, le temps d’un match de foot – il n’a pas trouvé la moindre seconde pour évoquer le climat. Quant à l’écologie, il lui a réservé 1 minute 40 pour rassurer les foules: la France s’est emparée du sujet «mieux et davantage qu’aucun autre pays au monde».

L’excellent site Reporterre a scruté le discours du premier devant l’Assemblée nationale sans rien n’y trouver de consistant à propos des périls météorologiques qui nous menacent, voire accablent déjà une grande partie de la population mondiale.

Et pourtant l’actualité aurait été propice pour dire deux mots sur le dérèglement climatique. La sécheresse inhabituelle à cette époque ne provoque-t-elle pas des mégafeux à Los Angeles? Bof, c’est si loin la Californie…

Les cyclones sur Mayotte et le droit du sol

Et Mayotte, alors, aux prises avec les dingueries de la météo? C’est loin certes mais c’est en France, non?

Ah! Mes chers amis, vous vous trompez! Bayrou a prononcé treize fois le nom du département sinistré. Mais sans le replacer dans le contexte climatique. Là-dessus, pas un mot. Non, ce qui l’intéresse, c’est de glorifier son plan de reconstruction et de débiter cette déclaration fumeuse sur l’immigration à Mayotte: «Un débat doit être ouvert sur le sujet, y compris sur les conditions nouvelles d’exercice du droit du sol». Le Canard Enchaîné qualifierait ce babil de «paroles verbales».

La minute FNSEA

Et sa minute quarante secondes sur l’environnement comment l’a-t-il employée? En prononçant cette puissante parole vachement performative: « L’écologie n’est pas le problème, c’est la solution ». Et si nous avons la solution, pourquoi se casser la tête? Passons à autre chose. Par exemple, à reprendre les éléments de langage du syndicat de l’agrobizness, la FNSEA, notamment en attaquanr– façon grand méchant mou – l’Office français de la biodiversité, comme le déplore Antoine Gatet, président de France Nature Environnement. Pour Bayrou, il n’y avait donc rien de plus pressé que de s’attaquer à la biodiversité. Beau symbole pour un règne que l’on espère le plus court possible.

L’amour du vide

La nature a horreur du vide. Le chef du gouvernement français l’adore. Il lui sacrifie un culte bavard, ce qui n’est paradoxal qu’en apparence. Les mots n’ont pas pour but d’être écoutés, ni même entendus; ils servent de machine à faire du vide, à ne pas aborder les périls les plus urgents qui nous guettent.

Cela dit, François Bayrou n’est pas le seul politicien au monde à laisser sombrer le dérèglement climatique dans les oubliettes et à soupirer que «l’écologie, ça commence à bien faire» façon Sarkozy.

Les dictateurs et les chefs d’Etats ou de gouvernements démocratiques ont au moins un point commun: l’ardent souci de garder leur pouvoir. Par la force pour les uns. Par la propagande électorale pour les autres.

Cette disposition d’esprit n’est guère compatible avec la prise en compte des rapports toujours plus alarmants du GIEC (Groupe intergouvernemental des experts sur le climat). Les dictateurs n’en ont rien à battre, trop occupés qu’ils sont à museler leurs sujets. D’eux, il n’y a rien d’autre à attendre que le pire.

Le piège abstentionniste

Et les démocraties? Par les débats qui les constituent, par la liberté d’expression qu’elles garantissent, elles pourraient développer une vision politique du climat. Caramba, encore raté! Elles n’arrivent pas à dépasser l’horizon vite borné des échéances électorales.

Cette incapacité à aborder les vrais problèmes en face ne peut que désespérer les citoyens et les inciter à bouder les urnes.

C’est le piège! En se confinant dans le marécage de l’abstentionnisme, les citoyens se réduiront à l’impuissance la plus absolue.

Pour sortir de cette impasse climatique, ils ne peuvent compter que sur eux-mêmes, à la base, en cultivant les rhizomes de la résistance, en multipliant les actions pour forcer les élus à tenir compte des impératifs écologiques, en s’opposant systématiquement aux opérations menées contre la biodiversité.

Bref, militer à hauteur des pâquerettes. Oui, je sais, ce n’est pas très tendance…

Jean-Noël Cuénod

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