Il y a quelques mois encore, les sondages prédisaient une large victoire de l’initiative de l’UDC pour le renvoi des criminels étrangers. Et c’est l’inverse qui s’est produit en ce divin dimanche ! Malgré les millions dépensés par son âme damnée, l’extrême droite blochérienne a reçu une claque retentissante. C’est un « non » franc et massif, pour paraphraser de Gaulle, qui est sorti des urnes helvètes.
Que s’est-il passé pour que nous assistions à un tel revirement dans l’opinion ? La mobilisation active sur les réseaux sociaux figure parmi les explications les plus plausibles.
Sur Twitter, sur Facebook, sur d’autres plateformes, la présence des opposants à l’initiative blochérienne s’est révélée plus massive que celles de ses partisans. Venant de milieux divers – évangéliques, protestants, catholiques, ONG humanitaires, mouvements de jeunesse, partis traditionnels de la gauche, du centre et de la droite libérale – les «twittos» ont relayé les blogues et les articles détaillant les multiples mensonges forgés par l’UDC pour appuyer sa propagande. Les petits ruisseaux de l’internet font désormais les grandes rivières de l’opinion publique.
Cette salutaire prise de conscience s’est déclenchée au bon moment : ni trop tôt ni trop tard. A cet égard, l’UDC avait commis l’erreur de partir trop vite en campagne, ce qui a donné aux opposants le temps nécessaire pour démonter le mécanisme pervers de l’initiative. Ainsi, sous couleurs de renvoyer les criminels étrangers, les blochériens voulaient en réalité saboter les bases de l’Etat de droit. Pour ce faire, ils ont utilisé la justice comme cheval de Troie en prétendant que les Chambres fédérales protégeaient les criminels étrangers. Mais les opposants à l’initiative ont pu démontrer que la loi actuelle retient déjà les infractions les plus graves pour autoriser l’expulsion automatique. Le texte de l’UDC était pris pour qu’il était réellement : non pas une initiative contre la criminalité mais un projet xénophobe de plus.
La défaite de l’UDC est cuisante. Mais son plan pour s’attaquer aux droits de l’Homme reste d’actualité. L’extrême droite ne cache pas sa volonté de sortir la Suisse de Convention européenne des droits de l’homme. Cette haine du «droitdelhommisme», pour reprendre l’expression de Jean-Marie Le Pen, est partagée par tous les partis de l’extrême droite européenne. Leur argument prétendant que cette convention est une atteinte à la souveraineté populaire pourrait faire sourire, si la chose n’était pas aussi porteuse de catastrophes.
En fait, la Convention protège le peuple contre les abus de l’autorité. Et si Blocher et ses camarades veulent l’attaquer, ce n’est pas pour le bien du peuple mais pour le leur. Il s’agit pour eux de saper tout ce qui s’oppose aux discriminations et à les protéger contre les lois réprimant le racisme.
L’UDC est bien organisée, grassement financée par Blocher et les siens. Il ne faut pas compter sur de nouvelles erreurs tactiques de sa part. A son tour, elle risque de mobiliser les réseaux sociaux comme l’ont fait ses adversaires. Blocher a perdu une bataille mais pas sa guerre.
Jean-Noël Cuénod
Photo: Blocher dans son antre fastueux avec vue sur le lac de Zurich
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