L’agresseur qui a tué un touriste et blessé un autre près de la Tour Eiffel, samedi soir, est présenté par la police comme un islamiste radical souffrant de troubles psychiatriques. Irrésistible, la tentation de psychiatriser le terrorisme pour contourner l’obstacle politique et se rassurer derrière l’alibi de la maladie mentale. C’est aussi oublier que folie et humanité sont parties liées.
Le ministre de l’Intérieur français Darmanin, quelques heures à peine après l’agression, a d’ores et déjà trouvé son bouc-émissaire: le corps médical en dénonçant un « ratage dans le suivi psychiatrique » de l’auteur des coups de couteau.
L’état « catastrophique » de la psychiatrie en France
Outre qu’il est vraiment très léger – pour rester poli – d’asséner d’emblée d’épaisses certitudes dans une affaire dont les mécanismes sont tout sauf clairs, la sortie de Darmanin risque fort de se retourner contre son gouvernement, façon boomerang.
Car si la psychiatrie en France se trouve dans un état « catastrophique » – à lire cette tribune du psychiatre Daniel Zaguri et de l’économiste Jean de Kervasdoué parue dans Le Monde du 1er juillet 2020 – à qui le doit-on ? Sinon à plusieurs années d’impéritie gouvernementale dont les six ans et demi de la présidence Macron qui n’a rien fait d’essentiel pour redresser cette situation.
Psy? Pas psy? Quel psy?
Concernant les liens entre troubles psychiatriques et terrorisme, deux tendances s’opposent, comme le relate le Journal international de Médecine sous le clavier de sa rédactrice en chef Aurélie Haroche.
Dans l’un de ses nombreux commentaires, le ministre Darmanin affirme qu’ « entre 25 et 40 % des personnes suivies pour radicalisation sont concernés par des maladies mentales ». Un mois et demi avant l’agression vers la Tour Eiffel, la psychologue Fanny Mauer-Motti diffusait ce touitte sur X, le 17 octobre dernier:
Les passages à l’acte terroriste en Europe ont très souvent un socle pathologique. Il ne s’agit pas de la religiosité qui mène au crime, mais de pathologies qui prennent une couleur idéologique ou religieuse. C’est important de le comprendre pour stopper ce mal profond. Ceux qui sont à surveiller ou à craindre sont ceux qui manifestent des troubles psychiatriques ou psychologiques, tout en investissant une idéologie quelle qu’elle soit.
Une autre psychologue, Cyrielle Richard, lui donne la réplique dans une citation reprise par le Journal international de Médecine:
Il suffit de faire une rapide recherche de la littérature scientifique pour voir que justement il n’y a pas de socle psychopathologique chez les personnes commettant des actes terroristes (…) Plaider la folie permet de mettre à distance des actes qui nous paraissent incompréhensibles et effrayants (…) La radicalisation et le passage à l’acte terroriste ont donc peu de rapport avec la psychiatrie.
Dans ce même article, le chef du service de psychologie de la Marine française, le docteur Yann Andruétan, met en garde contre une surestimation de la raison – combien de personnes dites raisonnables conforment leur journée en fonction d’un horoscope? – mais aussi de la science:
En naturalisant le problème du terrorisme, on évacue sa dimension politique. On ne peut être en guerre contre des fous! Le progrès finira bien par absorber ces fauteurs de troubles grâce à la toute-puissance de la science. Mais c’est penser celle-ci comme une forme de maîtrise plutôt qu’un mode particulier de connaissance du monde.
Classification des terroristes, une mode
N’avez-vous pas remarqué qu’il y a des modes en matière de classification des terroristes? Tout d’abord, on les disait issus des milieux pauvres vivant dans les cités à l’abandon. Ensuite le 11-Septembre ayant été perpétré par des jeunes gens bien riches et bien élevés, on s’est rabattu sur leurs origines arabes selon le préjugé musulman = arabe.
Puis voilà que des Européens dits « de souche » se sont mis à faire leur soumission à des groupes islamo-terroristes! (« 23% des Français impliqués dans des activités djihadistes sont des convertis » selon cet article publié par L’Express ).
Il fallait bien trouver un autre chausse-pied pour s’efforcer à grand peine de faire rentrer l’islamo-terroriste dans la petite case des préjugés. Va donc pour la folie ou, en termes plus convenables, la maladie mentale, le trouble psychiatrique, voire la schizophrénie.
Elle sert à tout, la folie, par son caractère vague et effrayant. Elle regroupe sous son entonnoir, à la fois des affections pathologiques et décrites comme telles par la Faculté – avec le vaste cortège de souffrances que cela suppose, s’exprimant parfois par des bouffées délirantes – mais aussi des comportements jugés déraisonnables par l’entendement général, sans qu’ils relèvent de la psychiatrie.
La part de l’imprévisibilité
Le fou, c’est donc l’autre. L’ennui, c’est que nous sommes toutes et tous tissés de folie puisque nous portons en chacun de nous une part d’imprévisibilité, cette liberté irréductible de faire n’importe quoi symbolisée par la Chute d’Eve et d’Adam.
Les pouvoirs s’efforcent de la réduire sans jamais y parvenir tout à fait. Le ministre français Darmanin se plaint-il qu’il y a eu des trous dans la raquette concernant le suivi psychiatrique de l’auteur de la récente agression? Mais il y aura toujours des trous dans la raquette! A moins d’instaurer un cauchemar totalitaire à la Chinoise. Et encore, même dans une dictature aussi connectée, la part d’imprévisibilité parviendra à faufiler sa folie.
Ravauder les trous dans la raquette? Danger!
Le danger relève moins des « trous dans la raquette » que de cette volonté de les ravauder.
L’obsession du contrôle social à tout prix ronge nos libertés sans pour autant nous garantir contre les attentats. C’est l’option darmanienne du perdant-perdant.
Cette part d’imprévisibilité vire au cauchemar pour les victimes d’actes de cette nature. Mais elle est à la racine même de ce qui nous rend humain, à savoir la liberté. Il faut en accepter les risques sauf à se tricoter un destin d’esclave.
Jean-Noël Cuénod
On ne fait mention de problème psychiatrique que lors d’une action perpétrée par un auteur qui délire au moment de la commission des faits.
Un activiste ou un terroriste n’agit jamais dans une phase de délire. Il réalise un acte, phantasmé sur un temps long, jusqu’au passage à l’acte.
Il y a un certain confort à désigner le corps médical…….
Bonjour, effectivement il est facile pour ce disculper de rejeter sa faute sur le corps médical, je ne sais pas si vous avez remarqué les signes avant coureurs signaler par les médias annonçons l’anniversaire d’un crime, aucune action sécuritaire n’est effectué, c’est seulement quand l’acte est commis qu’ils annoncent une sécurité renforcée et vous remarquerez juste avant le coupable a été interrogé par la (dgsi je ne suis pas sûr du sigle) service prétendument spécialisé dans le domaine je me demande pourquoi attendre que la maison soit en cendre pour agir sur l’incendie, mais depuis quelques décennies la faute c’est les autres et ça c’est dans tous les domaines , pour ce qui est des fanatiques religieux sont obsédé les fous de dieu cela ne les exempts pas de leurs culpabilités, faire croire qu’ils sont dérangés, alors dans ce cas là les fanatiques de musique ou de sport extrême sont aussi des malades mentaux,, bref je ne sais pas si mon resonnement est juste, mais c’est mon point de vue je peux me trompes l’erreur est humaine mais pas fatale cordialement Mr bonne journée