JO2024: Je tire une de ces flemmes olympiques…

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©JNC_Beaurecueil-Forge de la Poésie

Elle est re-née, la Flamme Olympique : Jouez hautbois, résonnez musettes. Et déraisonnez gazettes! Attendue par 150 000 Marseillais au Vieux-Port – qu’aucune sardine ne bouchait, fait à relever – elle a débarqué du trois-mâts Belem mercredi soir. Nous entrons désormais dans une nouvelle phase préolympique: l’enthousiasme obligatoire.

Quel ramdam dans ce bouillonnant vestige de la Grèce antique! Il faut dire que les médias ont auparavant procédé à un bombardement qui, pour être préventif, n’en était pas moins intensif.

C’est que, voyez-vous, les sondeurs inquiets avaient pris la température des Français et constaté qu’elle était fort basse. La perspective des Jeux Olympiques et paralympiques n’enthousiasmait guère le citoyen de base. Surtout dans son espèce parisienne. Un exode massif était même redouté.

Une Ville-Lumière plongée dans la nuit?

Les Jeux ne se dérouleraient-ils qu’entre des bataillons de rats et de minces compagnies d’étrangers? Des Visiteurs suffisamment riches pour se payer le séjour dans une Ville-Lumière qui, pourtant, risquerait d’être plongée au cœur d’une nuit qu’aucune flamme – fût-elle olympique – ne serait à même de raviver. Avec comme seul lumignon, celle tremblotante du Soldat Inconnu.

Comme un malheur ne vient jamais seul, voilà que le Moulin Rouge a perdu ses ailes!

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Dans la nuit du 24 au 25 avril, les ailes du Moulin-Rouge se sont effondrées. Un mauvais présage? ©FreCha via Wikipedia Commons

Macron descend de son Olympe

Il fallait donc qu’Emmanuel Macron descendît de son Olympe pour enviagrer les ardeurs supportrices. Déjà qu’il devait réveiller celles de ses concitoyens devenus moins prolifiques… Le travail de chef d’Etat en France est vraiment tuant, demandez-le donc à Louis XVI, Sadi Carnot ou Paul Doumer!

Alors, les gros médias ont embouché la même trompette virilisatrice. Le bon peuple est sommé de sortir de sa maussaderie boudeuse vis-à-vis de la vie en général et des Jeux Olympiques en particulier.

C’est qu’il ne faudrait pas fâcher Coca-Cola, AirBnB,Toyota, Samsung, Visa et autres financeurs privés qui ont versé plus d’un milliard d’euros pour figurer en bonne place à la devanture des JO.

Ni le tas des gros médias qui se précipitent vers les pis de la vache olympique afin de mieux la traire. Ni la masse des politocards qui se bousculent pour « être sur la photo », tout en espérant que ces jeux amuseront suffisamment citoyens pour les distraire de leur gestion foireuse et de leur bilan calamiteux.

Le spectre des éléphants blancs

Vous imaginez leur désarroi si les Jeux Olympiques ne soulèvent qu’un intérêt à peine poli? Tout ce fric jeté au caniveau, toutes ces vanités emportées dans le tout-à-l’ego, tous ces projets mirobolants transformés en éléphants blancs… La catastrophe mondiale!

Alors, on se rassure en haut lieu. On se dit qu’aux Jeux de Londres en 2012, les Anglais étaient passés par ces trois phases: grogne provoquée par les incidences fiscales de ces joyeusetés sportives; indifférence, une fois la grogne fatiguée; enthousiasme dès la Flamme olympique apparue sur le sol britannique.

La Divine Torche ayant débarqué hier à Marseille, tous les espoirs sont donc permis. Au fur et à mesure qu’elle « montera » à Paris, portée par des relayeurs qui parcourront les domaines les plus touristiques de la France, la Flamme – c’est tout de même sa nature et son destin! – portera les cœurs à leur plus haut point d’incandescence.

Oubliées, les guerres…

Oubliées, les guerres qui sévissent et celles qui s’annoncent; négligés, les massacres et leur répétitive comptabilité; zappées, les injustices qui rongent le corps social; dédaigné, le climat qui se dérègle.

Sans doute, avons-nous toutes et tous besoin d’une pause dans cette litanie qui rend triste la planète. Ne serait-ce que pour reprendre souffle.

Cela dit, cet enthousiasme sur commande, cette allégresse obligatoire, cette ardeur de façade, sont aussi crédibles qu’une promesse électorale.

A force d’être incité à l’exaltation sportive, je fatigue, voyez-vous!

Et voilà que je tire une de ces flemmes olympiques qui font le bonheur des siestes…

Jean-Noël Cuénod

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