Voici un hétéroptère – ce qui n’indique pas forcément son orientation sexuelle – nommé Cimex lectularius, nom savant de notre roturière punaise de lit (Source_ Wikipédia)

Elle nous manquait, l’angoisse. Le Covid a beau progresser au galop, il ne fait plus peur. Le terrorisme nous lâche pour un moment les baskets. Les émeutes se sont tassées au fond des cités. Les gilets jaunes palissent. Mais qu’est-ce qu’on s’emmerde! Heureusement, voilà les punaises qui reviennent sur le tapis. Plutôt dans nos plumards. Ah les braves bêtes!

Tiens, on les caresserait, si elles n’étaient pas si petites et surtout si piquantes.
Choses vues sur les écrans:

– Rennes, les punaises de lit gagnent du terrain et la psychose aussi ;

– Toulouse, on aperçoit des punaises de lit aux urgences du CHU;

– Paris grouille de punaises de lit;

– Aix-en-Provence, un amphi de la Fac de droit évacué pour suspicion de punaises de lit.

« Aux punaises, notre reconnaissance quasi-éternelle »

Merci chères bestioles de nous offrir cette angoisse, cette panique qui rompent la monotonie des mauvaises nouvelles contre lesquelles nous ne pouvons rien.

L’inflation prend l’ascenseur et chacun a bien compris que les dirigeants politiques ont beau appuyer sur tous les boutons pour le faire descendre, aucun ne fonctionne.

Après la guerre russe en Ukraine, voilà que se déploie la guerre azéro-turque en Arménie. A force, on bâille devant les écrans : mêmes images interchangeables, mêmes bombardements, mêmes soldats qui semblent revêtus du même uniforme tacheté.

Tiens d’ailleurs pourquoi ces uniformes uniformisés? Quand deux équipes portent des couleurs semblables, celle qui visite change de maillot. Les Etats-majors devraient prendre exemple sur le foot, ce serait mieux pour l’audimat.

Il faut à l’angoisse des lignes de fuite

Afin que l’angoisse se transforme en panique, il faut des lignes de fuite, des espaces vers lesquels courir à perdre haleine et raison.

Rien de tel avec l’inflation, les guerres, les trumperies diverses et avariées. Face à ces fléaux, l’impuissance devient générale et l’angoisse s’épuise par manque d’oxygène.

Nos chères punaises, au contraire, ne manquent pas d’air. Elles offrent l’avantage décisif de donner au moins l’illusion qu’il est possible de les combattre. Les escrocs l’ont bien compris, eux qui multiplient maintenant les démarches charlatanesques pour vendre leur poudre perlinpinpinesque à des prix bouleversifiants.

Les punaises de lit offrent donc ces indispensables espaces sur lesquels nous laissons courre nos angoisses à bride abattue.

Psychose toujours, tu m’intéresses!

Jean-Noël Cuénod