Surréalisme: la fête du centenaire au cœur de la forêt

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A Beaurecueil-Forge de la Poésie, les deux danseuses et chorégraphes Christine Zwingmann (à droite) et Louise Léguillon ont créé leur ballet « A flanc d’abîme…le Château Etoilé ©Arnaud_Galy_La Maison du Goupillou-G748

Nulle nostalgie, nulle larmichette sur ce beau passé bien trépassé. Le surréalisme bouge encore. Et ne finira jamais de bouger tant que des humains prendront les rêves pour leur réalité. Son siècle d’existence a été fêté un peu partout. Même au cœur – battant – de la forêt périgordine, dans une ancienne écurie devenue salle de spectacle au Château de Beaurecueil-Forge de la Poésie.

Châteaux et forêts, ces« vivants symboles » (1), ont toujours peuplé l’imaginaire des artistes se réclamant du surréalisme.

Même modeste, le Château de Beaurecueil-Forge de la Poésie – et la forêt dense qui l’environne au sein du Parc naturel régional de Périgord- Limousin – fourmillent de tous les songes accumulés au fil des siècles et, parfois, de l’épée.

Le « samedimanche surréaliste » qui s’y est déroulé les 12 et 13 octobre a rempli la salle Alcide-Dusolier durant ces deux jours consacrés à l’évocation du mouvement initié par André Breton à l’occasion du centenaire de son Manifeste du Surréalisme (le premier du genre) paru mercredi 15 octobre 1924.

Femmes en surréalisme et hommage à Annie Le Brun

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« Souvenirs de vacances », œuvre de Nelly Sanchez. Ses sites méritent le détour: http://www.nellysanchez.fr. ainsi que: https://www.instagram.com/nellysanchezcollagiste

Outre les conférences données par la professeure Catherine Reillat-Pesquer et votre serviteur, une artiste surréaliste du temps présent, Nelly Sanchez, a présenté ses collages et sculpture (voir photo).

Une large place a été réservée aux femmes surréalistes, grandes oubliées des festivités du centenaire, ponctuée par un hommage à Annie Le Brun, dernier témoin direct du Groupe surréaliste; elle est récemment partie rejoindre « ce point de l’esprit où tout cesse d’être perçu contradictoirement », selon la formule d’André Breton.

Le surréalisme du geste

Voilà pour le surréalisme du mot et de l’image. Quant au surréalisme du geste, il a été incarné et mis en mouvement par les danseuses Louise Léguillon et Christine Zwingmann. Outre deux intermèdes dansés samedi, elles ont créé dimanche leur ballet « A flanc d’abîme…Le Château étoilé », expression choisie par Annie Le Brun (L’Infini dans un contour) et qu’elle avait puisée dans ces vers d’André Breton (L’amour fou)

à flanc d’abîme,
construit en pierre philosophale
s’ouvre le château étoilé…

Il serait erroné de ne voir dans le surréalisme qu’un mouvement artistique, à la manière du cubisme ou de l’impressionnisme. Il est bien plus que cela.

Le surréalisme est une manière d’être au monde, de l’arpenter dans toutes ses dimensions. C’est une force libératrice de l’esprit et de toutes ses potentialités.

D’exquis cadavres…

Les participants au « samedimanche surréaliste » en ont d’ailleurs vécu l’expérience. Tous ont, en effet, participé à un célèbre jeu surréaliste, le « Cadavre Exquis », mis au point en 1925 par le poète Jacques Prévert et le peintre Yves Tanguy, alors tous deux membres du Groupe surréaliste (pour en connaître les règles, c’est ici).

Jeu d’enfants? Oui. Et alors? Pour retrouver le vent frais de la création, il faut toujours retomber en enfance, ce moment où la puissance créatrice est à son sommet.

L’artiste véritable est celui qui sait réveiller l’enfant qui ne dort en lui que d’un œil.

Par leurs mots assemblés dans un hasard qui n’est pas sans ordre, les participants ont découvert que leur création collective pouvait atteindre les rives de la beauté avec ses tribus étranges et susciter l’émotion née des affinités troublantes entre les mots choisis par les uns et les autres.

Etablir un choix parmi tous les « Cadavres Exquis » composés à cette occasion serait trahir cet esprit de convivialité créatrice qui s’est alors instauré et qui persiste à la manière d’un parfum entêtant. Peut-être ce blogue les reproduira-t-il intégralement plus tard.

Ce n’est pas tous les jours que l’on peut bâtir de songes et de désirs son propre « Château étoilé »…

Jean-Noël Cuénod

1 Allusion à ces vers de Baudelaire, « Correspondances » in « Les Fleurs du mal »: La Nature est un temple où de vivants piliers / Laissent parfois sortir de confuses paroles / L’homme y passe à travers des forêts de symboles / Qui l’observent avec des regards familiers.

Un merci particulier à Arnaud Galy de la Maison du Goupillou G478 auteur des photos (sauf de celle représentant l’oeuvre de Nelly Sanchez) et de la vidéo des performances dansées.

Extrait vidéo du ballet « A fleur d’abime…le château étoilé »

2 réflexions sur « Surréalisme: la fête du centenaire au cœur de la forêt »

  1. Centenaire au goût de bain de jouvence ! J’ai été cueillie par la joie serieuse de ses retrouvailles . Merci pour votre générosité.

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