Après l’arrivée de Donald Trump à la Maison-Blanche, une seule certitude : on ne va pas s’ennuyer durant son mandat. Espérons que nous serons à même d’en voir la fin. D’emblée, le président élu nous a fait un numéro de rétropédalage digne d’un Lance Armstrong d’avant les contrôles antidopages.
Le mur gigantesque à la frontière mexicaine et payé par les Mexicains eux-mêmes ? Euh, ben en fin de compte, ce seront des barbelés financés par les Américains. L’assurance-maladie d’Obama écrabouillée ? Non, non on va juste l’amender un brin. Le racisme ? C’est mal. La xénophobie ? C’est pas bien. Le machisme ? Oh, ça dépend, voyez-vous. Si c’est le mariage gay, alors OK. Mais niet pour l’avortement. Les « rednecks » avaient cru élire un mec aux burnes texanes et le voilà qui nous la joue Normand en escarpins. Il y a tromperie sur la marchandise !
Mais question fric, c’est toujours la bouteille à l’encre. Les Etats-Unis qui exigent la transparence la plus totale pour les autres pays – la Suisse a payé fort cher pour le savoir – ont un président dont la fortune est masquée par un épais brouillard. Il faut dire qu’il se vante d’être assez génial pour contourner son propre fisc. Cahuzac a trouvé son maître.
Et cet écran de fumée ne sera pas dissipé de si tôt. En effet, pour le temps de sa présidence, Donald Trump a confié son empire de promotion immobilière à ses enfants. C’est la première fois qu’un président américain restera lié à ses affaires durant son mandat. Ronald Reagan, les Bush et Bill Clinton avaient cédé leurs actifs à un tiers indépendant afin d’éviter de confondre leurs intérêts avec ceux de l’Etat qu’ils présidaient. Avec Trump, c’est un véritable gisement de conflits d’intérêts qui va s’ouvrir. Situation cocasse : le nouveau président possède un hôtel situé sur un terrain appartenant à l’Etat. Il sera donc locataire et propriétaire du même immeuble.
D’autres conflits d’intérêt plus sérieux pointent à l’horizon, notamment avec des établissements russes et saoudiens. Sans oublier la Deutsche Bank. Elle est actuellement poursuivie par la justice américaine qui la menace d’une amende de 14 milliards de dollars. Mais elle est aussi la principale créancière de l’empire Trump. Cela dit, un piège encore plus dangereux guette le président américain en Chine.
Le New York Times révèle le montant astronomique des dettes accumulées par les sociétés du clan Trump : au moins 650 millions de dollars. Parmi les principaux créanciers figurent la Bank of China. Un mastodonte que le magazine Forbes présentait en 2015 comme la quatrième entreprise mondiale. Quel est l’actionnaire largement majoritaire (plus de 69% du capital-actions) de cet établissement ? La Central Huijin Investment. A qui appartient cette dernière ? Au gouvernement chinois. Donc, le gouvernement chinois est le créancier du président des Etats-Unis. Bingo !
Or, durant la campagne électorale, Donald Trump voulait mener la guerre économique à la Chine en la menaçant d’une hausse massive des droits de douane. On peut désormais imaginer ce dialogue entre l’un des fils du président et son père :
- Dis donc p’pa, j’ai reçu un coup de fil de la Bank of China. Là-bas, ils n’ont pas l’air trop contents avec tes droits de douane. Ils me rappellent discrètement qu’on a une petite ardoise chez eux. Je fais quoi ?
- Bouge pas, fils, je vais causer avec l’ambassadeur chinois. On va oublier cette malheureuse histoire de taxes.
- Mais tes électeurs, ils vont pas trop gueuler ?
- Et puis quoi encore ? Y en qu’un qui a le droit de gueuler ici ! Non mais !
- Ouais, t’as raison. Et pour ton anniversaire, je vais t’offrir un rétrovélo électrique!
Jean-Noël Cuénod