Se mettre dans la peau de l’instant pour saisir ses mouvements intérieurs. Ne pas le subir, ni le contempler, ni l’ignorer. Le vivre sans séparation aucune entre soi et les mondes, comme si le temps et l’espace n’étaient qu’illusions que le souffle divin disperse. Voilà quelques instants capturés et intégrés corps et âme.
Ces instants peuvent être lus séparément ou à la suite, voire en en changeant l’ordre. Vous faites comme chez vous. D’ailleurs, vous y êtes, chez vous. Ils sont présentés en respectant la métrique et la composition de la forme poétique japonaise des Tankas (un tercet de 5-7-5 pieds et un couplet de 7 pieds chacun).
A LIRE
Les feux se déversent
Sur les plaines à l’agonie
Torrents crématoires
Cendre mort fertile
L’herbe songe à repousser
Sous le poids du jour
La rose baisse la tête
Ternit ses couleurs
Mais n’abdique pas son parfum
Et laisse passer l’orage
Le ciel rumine
Couché sur les prés jaunis
Qui ploient sous son poids
Pas un frisson sur les herbes
Seule attente l’étincelle
Une goutte d’eau
Avec tous ses univers
Tombe sur ma main
Et je deviens fumée
Ecartelée par les vents
Traces d’avion
Au flanc du ciel griffures
Le vent cicatrise
L’azur referme ses plaies
Jusqu’à la prochaine attaque
Dans l’ombre d’un cri
Le chat glisse vers le crime
Drapé de silence
Drame au sein de la forêt
Une vie s’est envolée
Une odeur d’étable
Vient apaiser la marche
Des hommes errants
Au bord du talus s’asseoir
Tirer du sac lard et pain
Au matin brumeux
Dans le vide je me lance
Les jambes en coton
Monde à l’état de nuées
Mais un jour l’atterrissage
Entre terre et mer
L’empreinte de ton pied
Jamais ne s’efface
Point fixe dans le ciel
Dormir à ta belle étoile
Jean-Noël Cuénod
A OUÏR
Merci cher Jean-Noël, c’est tellement profond et touchant.